vendredi 15 novembre 2013

J'apprends l'hébreu - Denis Lachaud

« Si on ajoute le monde extérieur au monde intérieur qui vit en chacun de nous, on obtient la somme de tout ce qui existe ; ce qui est connu par chaque individu et, aussi, ce qui est inconnu. Il y a du connu et de l’inconnu à l’intérieur de chacun, du connu et de l’inconnu à l’extérieur.
Pour moi, l’inconnu est un gouffre.
J’ai donc tendance à considérer l’inconnu comme dangereux. C’est une erreur. Influencé par mon gouffre qui me terrifie, je me laisse aller à imaginer que le vaste monde extérieur constitue une menace et c’est à cet endroit que je commets une erreur. »

Frédéric est un garçon singulier. À 17 ans, il a de graves problèmes de communication qui l'enferment progressivement dans un monde qui n'appartient qu'à lui. Sa seule manière de comprendre son entourage est d'enregistrer ses paroles avec un dictaphone et de les retranscrire à l'écrit. Après Paris, Oslo et Berlin, il atterrit en Israël avec sa famille. En découvrant l'hébreu, il croit pouvoir améliorer sa compréhension du langage. Il va alors partir à la rencontre des habitants de Tel-Aviv pour comprendre leur histoire et la relation qu'ils entretiennent avec leur territoire.

A travers un personnage singulier et attachant, l'auteur mène une réflexion sur la notion de territoire, d'identité et de langage. Il nous emmène sur les traces de l'histoire d'Israël en y mêlant l'histoire personnelle de Frédéric, dans une narration alternée entre l'adolescent et son père qui laisse apparaître deux réalités. L'écriture est précise, douce et plonge le lecteur dans les pensées du jeune homme, permettant d'assister à son progressif détachement du monde.

Actes Sud Babel, 7,70€, 236 pages.

jeudi 14 novembre 2013

Neige - Maxence Fermine

J'essaie de reprendre du service ! L'hiver est bientôt là, les plaids, le thé... Parfait pour découvrir de nouvelles pépites ! Au final, j'ai choisi de vous parler de mes derniers coups de cœur de manière courte, et j'espère efficace !


« En vérité, le poète, le vrai poète, possède l'art du funambule. Écrire, c'est avancer mot à mot sur un fil de beauté, le fil d'un poème, d'une oeuvre, d'une histoire couchée sur un papier de soie.
Écrire, c'est avancer pas à pas, page après page, sur le chemin du livre. »

A 17 ans, Yuko est un jeune Japonais passionné par les haïkus et la neige, mais promis à un destin de soldat ou de prêtre. Contre l'avis de son père et pour l'amour d'une jeune fille, il décide de traverser les montagnes pour aller à la rencontre d'un maître qui lui apprendra à colorer ses poèmes.

Paru à l'origine en 1999, Neige est un court roman à redécouvrir. Extrêmement poétique, tout en délicatesse et magnifié par les illustrations de Georges Lemoine, ce roman est une plongée gracieuse dans l'ancien Japon. 

Arléa-Poche, 12€50, 96 pages.

dimanche 4 août 2013

Lucia Antonia, funambule - Daniel Morvan

Rien de nouveau par ici... Le manque de temps, surtout. C'est long, d'écrire des chroniques. Peut-être devrais-je me contenter de deux-trois notes, sans faire de longues critiques. J'ai déménagé, je travaille dans une nouvelle librairie où je vais faire mon apprentissage et j'ai commencé à lire les romans de la rentrée littéraire.

A ce propos, le prochain Zulma, Lucia Antonia, funambule, de Daniel Morvan est un petit bijou. C'est un court roman très poétique, aérien, délicat, qui raconte l'histoire d'une funambule dont l'âme sœur, l'amie, la partenaire Arthénice est morte en tombant dans d'un précipice. Le récit alterne les souvenirs dédiés à Arthénice et la vie actuelle de Lucia Antonia, qui tente de se reconstruire sur une île en Bretagne, au fil des rencontres. C'est doux, c'est beau, un peu hors du temps et contemplatif. A découvrir le 22 août.

« Nous avons su qu'il n'était pas nécessaire de montrer les animaux les plus extraordinaires quand Arthénice est entrée en piste. Une bande de flanelle lui entourait le genou gauche. Elle tenait un livre à la main et le feuilletait. Elle a enlevé ses espadrilles et elle a gardé le livre. Distraitement, elle est montée sur le trapèze et s'est élancée, après avoir fini de lire une phrase. Le temps d'un clignement d'yeux, elle était là-haut, avec son livre. Un autre clignement d'yeux, j'entendis le froissement du trapèze dans mes oreilles. Le visage à l'envers d'Arthénice était face au mien, elle disait : tu es belle comme ça, tiens mon livre, et le trapèze l'emportait à nouveau à l'autre extrêmité du chapiteau.
De l'autre extrêmité, elle n'est pas revenue. »

Si j'ai un moment, j'essaierai de vous parler des derniers romans que j'ai aimés, notamment A moi seul bien des personnages, de John Irving, La Pendue de Londres, de Didier Decoin et Œuvres I, de Guillaume Dustan, que j'ai bientôt terminé.

Zulma, 16€50, 144 pages.

jeudi 13 juin 2013

Sweet Sixteen - Annelise Heurtier

« Molly se réveilla en sursaut.
En bas. Le choc venait d'en bas. Un horrible bruit de verre brisé.
Ça y est, ils avaient mis leurs menaces à exécution.
[…]
Le souffle court, les deux femmes déboulèrent en trombe dans le salon.
Face à la baie vitrée, Shiri leur tournait le dos.
L'espace d'un instant, Molly l'imagina tomber en arrière, la poitrine écarlate. Elle se coucherait sur elle et hurlerait dans l'odeur tiède et métallique de son sang.
Puis elle la vit. À travers le trou de la fenêtre, à l'extérieur, sur la pelouse.
Léchée d'immenses flammes, une grande croix du Ku Klux Klan. »

Voilà un moment que j'avais envie de chroniquer ce livre pour ados, sans trouver le moment idéal pour m'y mettre. Mais hop, voici une chronique avec pas mal de lecture !

Ce récit inspiré de faits réels se déroule en 1957 dans une petite ville en Arkansas. Le prestigieux lycée central de Little Rock décide d'ouvrir ses portes à neuf adolescents noirs, parmi lesquels se trouve Molly, l'une des narratrices. A l'époque, la ségrégation bat son plein et les noirs sont extrêmement mal perçus, ainsi que toutes les personnes qui les soutiennent.

Sweet Sixteen est un roman choral. Molly nous raconte son quotidien, son choix de faire partie des volontaires pour cette expérience extrêmement risquée, tandis que Grace, une adolescente blanche, d'abord hostile à ce projet, va progressivement changer d'avis sur la question, alors qu'elle est entourée par des personnes très conservatrices.

Les chapitres alternent les voix des deux jeunes filles, qui nous racontent la ségrégation sur fond de rêves d'adolescentes. L'écriture est fluide et agréable, le lecteur est vite entraîné dans le tourbillon des évènements et se laisse aisément embarquer dans les pensées des deux protagonistes.

On suit d'abord le cheminement de Molly, sa décision de tenter l'expérience, la discrimination à laquelle elle doit dès le début faire face. Elle vit dans une famille très unie qui, malgré la peur, la soutient jusqu'au bout du roman. Grace, quant à elle, ne se sent guère concernée par le sujet, même si elle a tendance à suivre l'opinion de ses amies très impliquées dans le maintien de la ségrégation. Au fur et à mesure du roman, au contact des neuf élèves noirs et plus spécialement de Molly, elle va se poser des questions sur la différence et progressivement réviser son jugement en constatant de nombreuses incohérences entre ce qui est dit sur les noirs et la réalité.

Le plus impressionnant dans ce livre est probablement la manière dont est décrite la violence. Elle apparaît de manière croissante, d'abord insidieuse lorsque Molly se voit refuser l'achat de lait par l'épicier, puis beaucoup plus visible lors de l'entrée au lycée. C'est une véritable haine des noirs qui est montrée ici et de nombreuses scènes sont tout simplement effarantes, la violence atteint un tel extrême que des militaires sont chargés de protéger les étudiants noirs dans l'enceinte de l'école. Molly doit faire face aux injures et à l'humiliation quotidienne, à l'acharnement des blancs, à la peur surtout. Chacun des neuf est poussé à bout, certains abandonnent, d'autres sont pris au piège, et Molly est régulièrement en proie aux doutes. Elle peut heureusement compter sur un groupe de résistance mené par Maxene Tate qui lutte pour la reconnaissance des noirs et contre le Ku Klux Klan, organisation qui menace toutes les personnes apportant un soutien aux noirs.

Si le sujet traité est difficile, l'ensemble est néanmoins allégé par des préoccupations d'adolescentes, de la manière dont on doit s'habiller pour la prochaine sortie au bowling au sourire échangé avec cet inconnu au lycée...

Un très bon roman !

Casterman, 12€, 218 pages.

mercredi 29 mai 2013

Le post inutile du jour !

Et parce que faire des pauses lecture... divertissantes, ça fait du bien aussi !

 
« Ne masturbez jamais un jeune homme par la fenêtre. On ne sait jamais sur qui cela peut tomber. »

mardi 21 mai 2013

Zoom sur les éditions Zulma

Bonjour bonjour !

Je tente un nouveau genre de chronique, "Zoom sur", qui me permettra de présenter un auteur, une maison d'édition ou quoi que ce soit que j'aurai envie de mettre en avant. On commence avec Zulma.

Du samedi 18 au lundi 20 avait lieu à Saint-Malo Étonnants Voyageurs, qui est le festival international du livre et du film avec pour thématique, bien entendu, le voyage. J'ai eu la chance de tenir le stand des éditions Gaïa et Zulma, mais je dois avouer que j'ai passé plus de temps à m'occuper de Zulma ; c'est pourquoi je tiens à mettre en avant cette maison d'édition, qui a été pour moi un gros coup de cœur. J'ai lu Le Peintre d'éventail ainsi que Les Haïkus du peintre d'éventail, d'Hubert Haddad et Huit Monologues de Femmes de Barzou Abdourazzoqov. Les deux premiers nous emmènent dans un univers très poétique, au Japon, tandis que le troisième est un très court ouvrage dans lequel huit femmes tadjiks racontent leur histoire. Ce sont des univers très différents mais qui m'ont beaucoup touchée. Hubert Haddad était d'ailleurs en dédicace durant tout le salon. Jean-Marie Blas de Roblès, auteur de Là où les tigres sont chez eux était également présent.

J'ai fait la connaissance de trois personnes travaillant chez Zulma et j'ai eu la chance de discuter plus longuement avec l'une d'entre elles, Catherine Henry, qui est responsable de la promotion et des relations avec les libraires, et d'en apprendre plus sur la maison d'édition. Zulma a été créée en 1991 et c'est seulement en 2006 qu'a eu lieu le remaniement qui a mené à la version actuelle. Zulma, c'est notamment Rosa Candida, un livre islandais qui a eu un grand succès au moment de sa sortie. Ce sont aussi des couvertures magnifiques qui attirent le regard, et des récits, des fictions, qui nous emmènent un peu partout autour du monde, là où le lecteur a rarement l'habitude d'aller. Tous les livres parus chez Zulma sont des coups de cœur de l'éditrice, Laure Leroy, souvent partagés par le reste de l'équipe. Je vous invite donc chaudement à découvrir cette maison d'édition à taille humaine et l'ensemble de son catalogue (j'ai craqué et j'ai acheté cinq de leurs livres... je pourrais vous faire la liste de tous ceux qui me tentent, mais ce serait un peu long ! Néanmoins, attendez-vous à ce que j'en reparle prochainement).

Le petit plus : Zulma a créé une collection poche début mai ! Quatre titres sont déjà disponibles.

Ce fut un chouette premier salon pour moi, malgré une tendinite tenace qui m'a empêchée d'en profiter pleinement, mais j'ai beaucoup apprécié le fait d'être proche des lecteurs, de parler des livres, de pouvoir découvrir des maisons d'édition que je connaissais peu, et d'être au contact d'autant de personnes différentes, qu'il s'agisse d'auteurs, d'éditeurs, de libraires, de bénévoles... Vivement le prochain évènement !

lundi 6 mai 2013

Et la BD dans tout ça ?

Hello !

En ce moment, je suis en train de lire Trop de bonheur, d'Alice Munro, un recueil de nouvelles. C'est pas mal mais je ne suis pas emballée plus que ça pour l'instant.

Je ne lis pas uniquement ce que je chronique, mais je vais brièvement évoquer 2-3 livres ici qui valent le coup :

 

Polina, de Bastien Vivès : Il n'est pas tout récent mais wow ! Une très très bonne bande-dessinée, ça se lit tout seul et ça a même plu à ma petite sœur. L'histoire d'une danseuse, de son entrée dans une école à son accomplissement professionnel. Avec le coup de crayon singulier de Bastien Vivès (je vous conseille Le Goût du Chlore, de lui également).


En silence, de Audrey Spiry : Là encore, une bande-dessinée aux graphismes extrêmement beaux, bien que très particuliers. On accroche ou pas du tout. L'histoire d'une famille et d'un couple qui partent faire du canyoning avec un guide un peu déjanté. Très très bien.

 
Rouge Tagada, de Charlotte Bousquet et Stéphanie Rubini : Alex est au collège et tombe amoureuse de la jolie Layla de qui elle va très rapidement se rapprocher jusqu'à devenir sa meilleure amie. Une bande-dessinée touchante sur les premiers émois, la naissance des sentiments, servie par des dessins légers.

 

Coney Island Baby, de Nine Antico : Il s'agit d'une biographie romancée et croisée de la pin-up Betty Page et la star du porno Linda Lovelace, explorant les coulisses de ces deux métiers très particuliers. Les dessins sont très chouettes, l'histoire prenante et l'auteur très sympathique, pour l'avoir accueillie en dédicace à la librairie.


Le Combat Ordinaire, de Manu Larcenet : Quand j'ai commencé à travailler, on m'a dit qu'en BD, c'était incontournable. Et, en effet, même si le style de dessins ne m'enthousiasmais guère, je dois dire que ça m'a beaucoup plus. Je n'ai lu que le tome 1, on y suit les aventures de Marco, photographe de guerre, qui en a assez de son boulot et plaque tout pour aller vivre avec son chat à la campagne. Il y retrouve la solitude, il y trouve l'amitié, l'amour. C'est parfois drôle, souvent sensible, toujours profond.


Voilà, ce sera cinq bandes-dessinées finalement. Comme ce n'est pas du tout ma spécialité (et qu'il est tard), je ne me risquerai pas à parler en détails du graphisme... Bonne lecture !

Les arbres voyagent la nuit - Aude Le Corff

« Manon semble lire dans ses pensées :
- Alors, tu as emmené tes amoureuses sur la dune ?
- Comment ? Euh, oui, certaines d'entre elles.
- C'est mignon.
Elle lui parle comme si c'était lui, le petit garçon.
- Tu les as embrassées ?
- Oui.
- Vous aviez le vertige ?
- Oui, pour différentes raisons !
- Est-ce que vous pouviez toucher les nuages ?
- Presque...
- Les étoiles aussi, le soir ?
- J'en ai rapporté plusieurs, dans mon sac à dos.
Manon sourit à l'évocation de cette image. »

Depuis que sa mère a quitté la maison en ne lui laissant qu'une lettre, Manon est devenue solitaire, parlant aux fourmis et aux chats, tandis que son père passe ses journées à attendre un signe de sa femme, sombrant dans la dépression et délaissant sa fille. La rencontre de la fillette avec Anatole, un professeur de français à la retraite, qui va l'apprivoiser en lui lisant Le Petit Prince va permettre à Manon de retrouver la joie de vivre et au vieillard un peu de compagnie et d'espoir. Autour de cette belle amitié se tissent les histoires de Pierre, le père de la fillette et de Sophie, sa tante. Ces quatre personnages décident alors de partir au Maroc pour retrouver Anaïs, la mère de la petite fille...

Les arbres voyagent la nuit, c'est d'abord le récit d'une amitié, de deux êtres extrêmement seuls qui trouvent du réconfort et un peu de chaleur humaine en entretenant une relation simple et sincère.
Grâce à toutes ces existences qui s'entremêlent, Aude Le Corff aborde de nombreux thèmes dans ce premier roman : la relation enfant-vieillard bien sûr, mais aussi la dépression, la vie conjugale, tout en nous laissant voir comment la vieillesse est vécue par la société. Elle écrit sur les marginaux, les laissés pour compte. La lecture est fluide, les éléments de l'histoire se mettent en place progressivement et naturellement, tandis que le lecteur s'attache aisément aux personnages, présentés dans leur vulnérabilité, ce qui les rend plus touchants encore. Le Petit Prince fait office de guide tout au long du récit et l'histoire d'Anatole et Manon n'est pas sans rappeler celle du petit garçon et du renard.

Les arbres voyagent la nuit, c'est un livre qui fait du bien ; positif et lumineux. C'est une histoire dans laquelle chacun tente de s'apprivoiser et de trouver sa place auprès des autres. Un joli roman de printemps pour les amoureux de la poésie (et les autres).

Coup de cœur !

Stock, 19€, 304 pages.

mardi 16 avril 2013

Frangine - Marion Brunet

« Je ne suis pas le héros, mais je suis

Le bavardage et la digression
L'oreille et les mots pour essayer de dire ce qui est à entendre, ce qui est à l'envi :
Les désenchantements et les éclats de bruit

En ces temps peu lointains où Pauline découvrait

Le monde
Le cruel
Le normal
et la guerre,

ma mère et ma mère, chacune pour soi mais ensemble, vivaient de leur côté des heures délicates.

C'est à moi qu'il revient de conter nos quatre chemins. Parce que j'aime ça, d'abord, dérouler les histoires comme on crée un langage ; et aussi pour que les choses soient claires, évidemment.

Comment comprendre, sinon ? »

Pauline et Joachim sont deux adolescents qui vivent avec leurs mères et mènent une existence relativement tranquille. Joachim est amoureux de Blandine et entame sa terminale, tandis que Pauline va entrer au lycée. La particularité de leur famille n'a jamais été un problème, jusqu'à ce que la discrète Pauline soit victime de harcèlement et perde pied.

Frangine est un roman qui colle de près à l'actualité, puisqu'il s'agit de l'histoire d'une famille homoparentale qui est confrontée à l'homophobie et à l'ignorance d'une partie de la population, du fait de sa différence. Le sujet est abordé de manière délicate et les questions inhérentes à cette situation peu connue sont traitées à travers le regard des deux adolescents. Le roman se construit sur la relation de Joachim, le narrateur, et Pauline, sa petite sœur. C'est l'histoire d'une évolution, de comment se construire lorsqu'on est confronté au regard des autres, jugés pour ce que l'on n'a pas choisi, pour une situation que l'on vit parfaitement bien mais qui reste anormale aux yeux d'un certain nombre de personnes.

L'intérêt de ce récit est de présenter plusieurs points de vue : le lecteur suit principalement l'existence de Joachim, ses questionnements amoureux, ses inquiétudes concernant sa sœur mais également la vie quotidienne de Julie et Maline, les deux mamans, leurs histoires respectives, les relations avec leurs parents... L'homoparentalité est au centre du récit mais Pauline et Joachim n'en restent pas moins des adolescents qui essaient de se construire, de s'affirmer et de trouver leur place dans le monde comme tous les jeunes.

Frangine est un très joli récit, porté par une écriture légère et poétique et traitant avec simplicité d'un sujet rarement abordé en littérature jeunesse, au gré du quotidien de la famille, des souvenirs et des questionnements de chaque personnage. C'est un roman optimiste qui pose la question de la différence, du choix de vivre sa vie comme on l'entend et le mieux possible. Joachim, Pauline, Maline et Julie sont quatre personnages extrêmement attachants, et finalement extrêmement banals et qui aspirent à la même tranquillité que n'importe quelle famille dite « traditionnelle ».

Exprim' Sarbacane, 14,90€, 262 pages.

vendredi 12 avril 2013

La première chose qu'on regarde - Grégoire Delacourt

La première chose qu'Arthur Dreyfuss regarde, ce sont les seins des femmes.

« Arthur Dreyfuss aimait les gros seins. Il s'était d'ailleurs demandé, si d'aventure il avait été une fille, et parce que sa mère les avait eus légers, sa grand-mère lourds, du moins dans le souvenir des étreintes asphyxiantes, s'il les aurait eus gros ou petits. Il trouvait qu'une poitrine conséquente obligeait à une démarche plus cambrée, plus féminine, et c'est la grâce de ces silhouettes en délicat équilibre qui l'enchantait ; le bouleversait parfois. »

C'est ainsi que commence ce roman. Pourtant, les poitrines opulentes n'en sont pas le sujet, bien que cette question de la taille y revienne régulièrement. Non, ici, il s'agit d'une histoire d'amour. Arthur Dreyfuss a vingt ans, il est garagiste et vit dans un village perdu, dans une petite maison au bord de la départementale. Sa vie est tranquille, rythmée par les journées au garage de PP, quelques lectures et quelques séries en DVD. Jusqu'au jour où Scarlett Johansson sonne chez lui, page 24.

La première chose qu'on regarde est une histoire d'amour, une histoire sur les faux-semblants et les illusions. On y trouve une réflexion subtile sur le culte de l'apparence et de la beauté. Mais, plus encore, on retient de ce récit un air d'Amélie Poulain, distillé par la présence de gens simples, de gens qui cherchent le bonheur, de gens qui tombent amoureux. On y lit la joie d'être à deux, mais surtout les blessures de l'enfance : un père qui a disparu, une petite sœur dévorée par un chien, une mère qui s'est tue et qui n'a plus jamais embrassé sa fille. Arthur et Scarlett, ce sont deux êtres cabossés qui se trouvent, qui tentent de se réparer, qui croient y parvenir. C'est un roman sur l'absence et sur deux solitudes qui se rejoignent. La première chose qu'on regarde est un livre à la fois léger et lourd, une histoire portée par une écriture sensible et parfois drôle qui rappelle que la beauté du bonheur est inhérente à sa fragilité.

JC Lattès, 17€, 264 pages.

PAL = Pile A Lire et livres lus

Ma PAL du moment (que j'essaierai de mettre à jour régulièrement) - par ordre alphabétique d'auteur :

Les + et les - pour donner mon avis, à titre indicatif :
+++ coup de cœur
++ très chouette, à découvrir !
+ lecture agréable
- pas emballée

NB : il est possible que j'en oublie parce que je ne pense pas souvent à mettre la liste à jour...

En cours (1er septembre) :
Le quatrième mur - Sorj Chalandon

A lire (en vrai, j'ai laissé tomber, y en a trop) :
Petit éloge de la douceur, Stéphane Audeguy 
My First Sony, Benny Barbash
Antigone, Henri Bauchau
Vous ne connaîtrez ni le jour ni l'heure, Pierre Béguin
Là où les tigres sont chez eux, Jean-Marie Blas de Roblès
Les vies de Luka Arnaud Cathrine
Au bonheur des voiles, Stéphane Chaumet
Lennon, David Foenkinos
La Consolante, Anna Gavalda
Dans une chambre inconnue, Damon Galgut
Eux sur la photo, Hélène Gestern
Palestine, Hubert Haddad
Montecore, un tigre unique, Jonas Hassen Khemiri 
Joyeux Noël, Alexandre Jardin
Le Chant du peuple juif assassiné, Yitskhok Katzenelson
Quand les colombes disparurent, Sofi Oksanen
Pico Bogue - Tome 1, Dominique Roques & Alexis Dormal
Une Place à Prendre, JK Rowling
Toute passion abolie, Vita Sackville-West
L'arrache-cœur, Boris Vian
La fille sans qualités, Juli Zeh


Lus (je vais finir par les classer en catégories et en année de lecture...) :
Huit monologues de femmes, Barzou Abdourazzoqov ++
Coney Island Baby, Nine Antico ++ (BD)
Le jardin de l'aveugle, Nadeem Aslam+
Mon ami Dahmer, Derf Backderf +++ (BD)
La chambre de Giovanni, James Baldwin +++
Profanes, Jeanne Benameur ++
La singulière tristesse du gâteau au citron, Aimee Bender +++
L'été slovène, Clément Bénech  +
La fille dans le vestiaire des garçons, Hubert Ben Kemoun + (Jeunesse)
La plus que vive, Christian Bobin +
Chambre 2, Julie Bonnie +++
Je suis la marquise de Carabas, Lucile Bordes -
Sauvage, Nina Bouraoui ++
Standard, Nina Bouraoui  + 
Rouge Tagada, Charlotte Bousquet & Stéphanie Rubini ++ (BD jeunesse)
Moi, j'attends de voir passer un pingouin, Geneviève Brisac ++
Frangine, Marion Brunet +++ (Jeunesse)
Léon et Louise, Alex Capus ++
Les garçons perdus, Arnaud Cathrine & Eric Caravaca +++
La petite fille de Monsieur Linh, Philippe Claudel  +++
Sauf les fleurs, Nicolas Clément +++
Les arbres voyagent la nuit, Aude Le Corff +++
Mauvais Genre, Chloé Cruchaudet (BD) +++
Les Séparées, Kéthévane Davrichewy +
La pendue de Londres, Didier Decoin ++
La première chose qu'on regarde, Grégoire Delacourt +
Les Frères Sisters, Patrick DeWitt ++
La vérité sur l'affaire Harry Québert - Joël Dicker ++
Œuvres I, Guillaume Dustan ++
Contrepoint, Anna Enquist +
Les oreilles de Buster, Maria Ernestam +++
Toujours avec toi, Maria Ernestam ++
La Sauvage, Jenni Fagan +++
Chrysis, Jim Fergus  +
Neige, Maxence Fermine ++
Les Apparences - Gillian Flynn -
Pour trois couronnes, François Garde +
Si rien ne bouge, Hélène Gaudy +
Heather Mallender a disparu, Robert Goddard -
Nos étoiles contraires, John Green ++ (Jeunesse)
Qui es-tu Alaska ?, John Green ++ (Jeunesse)
Le Confident, Hélène Grémillon +++
L'été à Lulaby, Rémi Giordano ++
Tombé hors du temps, David Grossman +++
Le Peintre d'éventail, Hubert Haddad ++
 Les Haïkus du peintre d'éventail, Hubert Haddad +
Frances (épisodes 1, 2, 3), Joanna Hellgren +++ (BD)
Sweet Sixteen, Annelise Heurtier +++ (Jeunesse)
A moi seul bien des personnages, John Irving ++
Des gens très bien, Alexandre Jardin  ++
Esprit d'hiver, Laura Kasischke +
J'apprends l'hébreu, Denis Lachaud +++
Le Combat Ordinaire, Tome 1, Manu Larcenet +++ (BD)
Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s'annonce, Lola Lafon +++
Demain, j'arrête, Gilles Legardinier -
Nina, Frédéric Lenoir et Simonetta Greggio -
Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s'annonce, Lola Lafon +++
Écoute la pluie, Michèle Lesbre +
Un petit boulot, Ian Levison +++
Mobiles, Sandra Lucbert -
Une femme aimée, André Makine  +
Le faire ou mourir, Claire-Lise Marguier +++ (Jeunesse)
Skandalon, Julie Maroh (BD) +
Paradis inhabité, Ana Maria Matute ++
Home, Toni Morrison +
Lucia Antonia, funambule, Daniel Morvan +++
Le ciel est partout, Jandy Nelson ++
Comment les fourmis m'ont sauvé la vie, Lucia Nevaï +++
Vénus Erotica, Anaïs Nin +
Le mystérieux Mr. Kidder, Joyce Carol Oates ++
La mer, Yoko Ogawa +
Rosa Candida, Audur Ava Ólafsdóttir ++
Western Girl, Anne Percin ++ (Jeunesse)
Muette, Eric Pessan +
Un notaire peu ordinaire, Yves Ravey ++
Le diable tout le temps, Donald Ray Pollock ++
Les Yeux de Lisa, Karine Reysset ++ (Jeunesse)
Une vie de racontars - Livre 1, Jørn Riel -
Petites Morts, Charlotte Roche -
Divergente, Veronica Roth + (Jeunesse)
Eleanor & Park, Rainbow Rowell +++
Bernadette a disparu, Maria Semple +
Le cœur des louves, Stéphane Servant  +++ (Jeunesse)
En silence, Audrey Spiry +++ (BD)
Une autre époque, Alain-Claude Sulzer ++
Apprendre à prier à l'ère de la technique, Gonçalo M. Tavares +
L'invention de nos vies, Karine Tuil +
La fabrique du monde,  Sophie Van der Linden +++
Polina, Bastien Vivès +++ (BD)
Nos Mères, Antoine Wauters +++
Ethan Frome, Edith Wharton +
Les cygnes sauvages, Kenneth White  +
En souvenir d'André, Martin Winckler ++
Les frères Sisters, Patrick deWitt ++
Décompression, Juli Zeh +++

Il faut bien commencer par quelque chose.

Bonjour, bonsoir, dans tous les cas, bienvenue !

Apprentie libraire, j'ai décidé de créer ce blog pour partager mes lectures, mes coups de cœur... Histoire de tout compiler au même endroit, sans prétention aucune, juste pour le plaisir.

Bonne lecture !